Jadis objet de fierté de toute la nation Arc-en-ciel et modèle à suivre pour le continent, la compagnie publique joue aujourd’hui sa survie. Explications.
S’il y a bien un domaine qui faisait l’orgueil de South African Airways (SAA, 6,8 millions de passagers en 2017) et suscitait l’admiration de ses pairs il y a encore une vingtaine d’années, c’était son centre de maintenance. « L’un des meilleurs du monde, les appareils des plus grandes compagnies venaient y effectuer leurs grandes visites techniques, rappelle, avec l’œil qui pétille, le Français Sylvain Bosc, directeur général adjoint de SAA entre 2014 et 2017. Sous embargo pendant l’apartheid, l’Afrique du Sud avait appris à fabriquer ses propres hélicoptères et avions de combats et disposait par conséquent d’excellents techniciens. »
Signe des temps, le 24 octobre, l’aviation civile sud-africaine a cloué au sol durant deux jours une quarantaine d’appareils entretenus par SAA Technical pour des raisons de sécurité. Ce n’est qu’un des nombreux symptômes de l’état de santé catastrophique d’une compagnie qui fut l’une des plus brillantes du ciel africain.
Son avenir en jeu
Depuis dix ans, l’ex-fleuron sud-africain, fondé en 1934, n’en finit plus de sombrer. Au point que, désormais, sa survie est en jeu. Ainsi, plusieurs grands assureurs de voyages, comme le sud-africain Santam, ont cessé à la fin de novembre de couvrir les billets de SAA. « Face à ces difficultés de paiement, la compagnie a aussi perdu la confiance de certains de ses fournisseurs, qui risquent de ne plus l’approvisionner en pièces », soupire Alain Tchale, directeur de la stratégie d’Eways Aviation, fournisseur de services de plusieurs compagnies africaines.
Des craintes renforcées par le fait que l’entreprise n’a pu régler que la moitié des salaires de ses personnels le mois dernier. Le 22 novembre, ceux-ci mettaient néanmoins fin à huit jours de grève après avoir obtenu une augmentation des rémunérations, qui sera effective au début de 2020. Le mouvement social a été particulièrement douloureux pour les finances de la compagnie, engendrant 3 millions de dollars de pertes par jour.
L’entreprise publique, dont aucun résultat n’a été publié depuis 2017, a été finalement placée le 5 décembre sous procédure de sauvetage par le gouvernement, qui a nommé un administrateur, Les Matuson. Un mécanisme qui lui permet de poursuivre son exploitation grâce à l’apport de 4 milliards de rands (environ 250 millions d’euros) par ses prêteurs (Absa, Investec…) et du Trésor national. Depuis 1994, Pretoria a déjà injecté dans SAA 3,9 milliards de dollars, dont 1,4 milliard au cours des trois dernières années.