A l’occasion du 47è anniversaire de la grande grève des 17 et 18 décembre 1975, l’Unité d’Action Syndicale (UAS) a publié une déclaration commémorative qui rappelle la lutte héroïque du mouvement syndical burkinabè contre l’instauration d’un parti unique et sa quête de liberté et de démocratie qui demeure une constante dans un contexte sécuritaire particulier au Burkina. voici la déclaration en intégralité.
Camarades militantes et militants,
Travailleuses et travailleurs du Burkina Faso,
A l’occasion de ce 47è anniversaire de la grande grève des 17 et 18 décembre 1975, l’Unité d’Action Syndicale (UAS) salue cette action des devanciers qui a empêché la mise en place du Mouvement National pour le Renouveau (MNR), un projet de parti unique qu’ambitionnait d’installer le régime du Général Sangoulé LAMIZANA. En effet, pour le régime d’alors, le MNR devrait être le « cadre unique pour toutes les activités sociales, culturelles et politiques » et toute indifférence à son égard était perçue comme « une atteinte à la sécurité de l’Etat ».
Cette action initiée par les organisations syndicales était conforme aux traditions du mouvement syndical de notre pays qui, depuis les indépendances, a exprimé à plusieurs occasions son attachement à la liberté, à la démocratie. Informées du projet, les quatre centrales syndicales de l’époque (CNTV, CSV, OVSL, USTV), en unité d’action avec les organisations d’élèves et d’étudiants, ont convoqué un meeting qui a rassemblé une foule immense à la Bourse du Travail de Ouagadougou le 30 novembre 1975. Le mouvement syndical a ensuite appelé les travailleurs à une grève de 48 heures les 17 et 18 décembre 1975 qui connut un immense succès. Ouagadougou, ainsi que d’autres villes du pays se transformèrent en villes-mortes ces jours-là et le Gouvernement du Renouveau National (GRN) fut amené à s’auto-dissoudre le 29 janvier 1976.
L’UAS, en tant qu’héritière de ce mouvement s’efforce de marcher dans les sillons des anciens dans un contexte très difficile marqué par deux faits majeurs : d’une part une situation sécuritaire qui a atteint un niveau critique et d’autre part, une crise politique se traduisant par une recrudescence des coups d’Etat.
Sur la situation sécuritaire
La gravité de la situation se traduit par la perte du contrôle d’une bonne partie du territoire (plus de 40% !), la multiplication des attaques terroristes qui ont pour conséquence plus d’un million et demi de déplacés internes confrontés aux besoins de logement, d’alimentation, de sécurité, de santé, d’éducation, etc. A l’échelle du pays, ce sont des centaines d’écoles fermées faisant plus de 700 mille élèves privés de l’accès à l’école, des centres de santé fermés, des commissariats, des brigades de gendarmerie et autres infrastructures détruits, des récoltes et biens des populations pillés ou détruits. L’insécurité a aussi eu pour conséquence la fermeture de six sociétés minières.
Sur la crise politique
La crise politique que vit le pays depuis déjà plusieurs années ne fait que s’approfondir. Les dernières manifestations de cette crise ont été les deux coups d’Etat opérés en l’espace de huit (8) mois : celui du MPSR I en janvier 2022 et celui du MPSR II en septembre 2022. Ces deux coups d’Etat se sont fondés sur une accusation de mauvaise gestion de la crise sécuritaire des gouvernements précédents.
Ces deux crises sont durement vécues par les populations et les travailleurs confrontés à l’insécurité, à la perte de parents et proches, à une vie chère qui s’aggrave mois après mois.
L’extrait ci-après de la déclaration de l’UAS du 29 décembre 2021 garde toute son actualité : « l’une des causes fondamentales de l’échec du pouvoir du Président Roch Marc Christian KABORE à lutter efficacement contre l’insécurité et le terrorisme réside dans la piètre qualité de sa gouvernance, faite de nominations de complaisance, d’encouragements de faits de corruption, de vols et de détournements. Des faits que l’UAS n’a eu de cesse de dénoncer à travers ses déclarations et qui font régulièrement la Une de la presse burkinabè.
La crise qui secoue le Burkina Faso se manifeste, entre autres, sur le plan politique par la faillite de toutes les institutions de l’État néocolonial qui se révèle incapable de répondre aux attentes des populations. La complaisance vis-à-vis des fautes de gestion a ainsi gangrené tous les piliers institutionnels de la République, de la Présidence du Faso à l’Assemblée nationale, en passant par les différents ministères et institutions, y compris l’Armée. »
Camarades,
De nombreux défis interpellent aujourd’hui le mouvement syndical en l’occurrence l’insécurité et ses conséquences, les menaces contre les libertés démocratiques et syndicales, la précarité des emplois, la stagnation des salaires dans le privé, la crise sécuritaire, le développement de la corruption, l’impunité et la vie chère. Sur la question sécuritaire, l’UAS s’est prononcée pour une organisation et un armement du peuple pour son autodéfense et ainsi faire victorieusement face aux attaques terroristes. Au lieu de cela, l’option du gouvernement a été de recruter 50 000 Volontaires pour la Défense de la Patrie en tant que supplétifs d’une armée qui a déjà montré des insuffisances sinon son échec.
Au cours de l’année 2022, l’UAS a entrepris la tenue d’assemblées générales régionales qui ont pu se tenir à Koudougou, à Ouaga et à Bobo. Il restait l’assemblée générale de Koupéla quand est survenu le coup d’Etat du MPSR II.
Les secrétaires généraux s’attèleront à finaliser la plate-forme revendicative élaborée à ces occasions.
Ils invitent les syndicats membres de l’UAS, les responsables à tous les niveaux à travailler au renforcement de leurs structures et à suivre l’évolution de la situation nationale avec toute l’attention requise.
Vive les dates historiques des 17 et 18 décembre 1975 !
Vive l’unité de lutte des travailleurs !
Ouagadougou, le 16 décembre 2022
Ont signé :
Pour les Centrales syndicales :
Le Président de mois:
El Hadj Inoussa NANA
Secrétaire Général/FO/UNS
Pour les Syndicats Autonomes :
Le Président de Mois
Alain SOME
Secrétaire Général / SYNTRAPOST